2012 - Mi And L'Au - If Beauty Is A Crime - Review / Chronique

Cela fait quelques années que je les ai dans mon rétroviseur, collectionnant religieusement leurs trois opus sans même les avoir écouté attentivement comme cela parce que je trouvais leur musique à mon goût. La première impression, quand on se fait confiance, est souvent la bonne. Depuis la sortie de leur troisième opus If Beauty Is A Crime fin janvier 2012, je ne peux plus me passer de ce duo d'une complémentarité troublante. D'ailleurs, le mot troublant est certainement celui qui sied le mieux pour décrire en un mot l'équipe, à la ville comme sur scène, formée par la Finlandaise Mira Romantschuk (Mi) et le Français Laurent Leclere (L'au). Une rencontre et un coup de foudre à Paris les a réuni uniquement pour le meilleur. Leur premier opus éponyme (2005)  est le fruit d'un break prolongé dans une cabane perdue quelque part en Finlande. L'au inspiré par Nick Drake a écrit, composé, en compagnie de sa tendre moitié, un univers boisé et ascétique. Essentiellement guidé par une guitare acoustique, ce disque s'avère captivant : on y découvre la voix suave et hypnotique de Mi (fort bien secondée par la belle voix de baryton de son alter ego) ainsi que des sonorités folk aussi impressionnistes que minimalistes. Les contours, aux premiers abords, glacés de cette première oeuvre révèlent en réalité grâce, sobriété et poésie. Un premier voyage sublime qui ne verra de suite que quatre ans plus tard en compagnie de Good Morning Jokers (2009). 17/20.

Un titre blagueur qui représente bien la pochette hideuse de ce second opus. On craint le pire et pourtant c'est tout le contraire qui se passe une fois qu'on insère son contenu sur une platine, et alors que nous étions séduits par leur premier disque, intrigué par ce mystérieux duo, Le successeur est tout simplement bouleversant et renversant. Alors que les trois quarts des artistes se cassent la gueule sur le fameux dilemme de la sortie du second opus, pour eux ce fut finger in the nose. Incroyable. L'ascétisme folk est mis quelque peu au placard (en tous cas pour une majorité des morceaux) pour embraser des sonorités plus modernes, sophistiquées, davantage capables d'émouvoir : Bingo, Transparent, They're Coming, Dancing and Smiling ou encore Dance On My Skin représentent à merveille cette nouvelle facette musicale esthétisante et enivrante. De la terre, le duo a atteint les étoiles sur cet opus à la beauté surréaliste et féerique. Le calcul est simple, j'aime tant cet album qu'il figure parmi mes favoris de 2009. 19/20.

Je ne sais la motivation qui pousse certains artistes à refaire sans cesse le même album mais en tous les cas on ne peut, jusqu'à maintenant, reprocher à ce duo d'être dans la redite. Pour ce dernier opus en date, apparu dans les bacs en janvier 2012, mari et femme ont décidé de changer diamétralement de fusil d'épaule d'un point de processus artistique. If Beauty Is A Crime (cette fois-ci doté d'une superbe pochette artistique) a été réalisé entièrement par le biais d'un logiciel sur ordinateur. Tout est en "toc". En fait, non bien entendu, il y a toujours les magnifiques voix des protagonistes plus séduisantes que jamais et le talent d'écriture et de composition qui semble intact, voire plus libre, dans cette nouvelle quête d'idéal. Si l'album a été nommé If Beauty Is A Crime cela n'est pas pour rien, on ressent le besoin chez ce couple de trouver la beauté et la grâce jusque dans la noirceur de leurs pensées. L'esthétisme de leur musique est devenu comme une globalité mais n'écrase pas le fond. Le contenant sophistiqué, glamour et épuré se trouve à mille lieux de leurs débuts boisés et organiques. Bien que le titre éponyme soit définitivement pop électro, certainement leur morceau le plus accessible à ce jour, il ne reflète bizarrement en rien les dix autres titres d'If Beauty Is A Crime. Il ne dénote pas non plus à cause de sa belle indolence sensuelle.

En réalité, Territory Is An Animal, qui ouvre l'album sur une note symphonique au son du chant élégiaque de Mi, annonce le réel changement de cap musical du duo. Alors que Good Morning Jokers tutoyait les étoiles et se montrait souvent fragile, bricolé et émouvant, ce nouvel opus a la tête en plein dans les étoiles sous un ciel d'une noirceur abyssale. Sans passer par la case du titre éponyme, 360 continue dans une voie vaporeuse et désenchantée, les arrangements électroniques sont magnifiquement carrés et glacés. Limouzine est un peu plus fin et humain, nous nous retrouvons plongés dans une sorte de périple mélancolique sombre et majestueux. Après deux chants en duo, Mi redevient la seule et unique vedette sur Magic 80. Un titre épuré, piano/voix (de velours), d'une beauté et d'une classe dont seul le duo a le secret. Tout simplement magique. Porcupine empreinte des sentiers davantage surnaturels, un peu de la même façon que si le couple nous contait une histoire des frères Grimm. Un sublime titre magnétique. Faces, à l'image de Territory Is An Animal, flirte avec la musique classique et élégiaque et impressionne l'auditeur engourdi sous le sort jeté par Mi And L'Au. Superbe. Pour la première fois, le couple propose un morceau chanté en finlandais Världen, une lullaby noir et aérienne enchanteresse. Silk est sans doute le titre se rapprochant le plus du morceau éponyme, un peu plus pop/électro mais toujours aussi lascif et hypnotique. One Day renoue pour une dernière fois avec de somptueuses et enveloppantes sonorités voluptueuses et aériennes avant de clôturer sur l'instrumental et expérimental Warrior pour un final assourdissant de beauté.

 

Must Have Absolue de 2012, ce duo est à (re)découvrir de toutes urgence pour un voyage sublimement fantasmagorique.

Note Finale : 19/20

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