Avec presque 15 ans de carrière discographique, la suédoise Jeanette Lindström s'est imposée comme l'une des figures majeures de la scène jazz scandinave. Depuis ses débuts avec Another Country (1995) qui souleva autant de réactions positives auprès des du public que des professionnels (qui l'honoreront de plusieurs prix), elle nous a habitué, dotée de quelques arguments imparables que sont sa plume et sa somptueuse voix profonde, émouvante et mature, a nous concocter un univers jazz sensible, élégant et racé, arrivant toujours à se distinguer de la masse de par sa richesse musicale et son intelligence. En effet, la belle dame n'a jamais osé céder aux alarmes d'un mixage facile avec la "pop" musique pour attirer de nouveaux auditeurs en mal d'une nouvelle Norah Jones ou autre copie et nous lui en serons à jamais redevables. Après la réalisation de cinq autres albums d'une qualité irréprochable (parmi lesquels : Feathers en duo avec le pianiste Steve Dobrogosz, 2001, Walk, 2003 et In the Middle of This Riddle, 2005), elle est revenue l'an passé avec un album concept Attitude & Orbit Control qui explore avec inventivité et imagination les sentiers d'un opéra aux teintes jazzy et rock. Ambitieux, audacieux et magistral.
C'est lors d'une visite une viste au Swedish Space Corporation que Jeanette Lindström a décidé d'appeler son futur album Attitude & Orbit Control, cela lui semblait naturel, une métaphore et un parallèle entre les fondements de ce qui dirigent notre univers et ce que nous, être humains, vivons dans notre quotidien terrestre. Ce nouvel opus contient uniquement des compositions originales (à une exception près) et résulte du fruit de la collaboration étroite entre Jeanette Lindström et Magnus Öström (qui apparaît au titre de multi instrumentaliste et co-producteur). Ce jazz opéra spatial ouvre, en grandes pompes, sur le feutré et intense We Would, le ton est donné, Jeanette nous envoie faire une ballade dans l'espace en compagnie des astres les plus scintillants. Sur All We Have Is Now, la seule reprise présente sur l'album, celle d'un morceau du groupe rock psychédélique Flaming Lips, Jeanette lui donne véritablement des ailes quitte à nous donner le vertige tant sa beauté esthétique nous laisse sans voix. L'une des nombreuses merveilles qui parsèment l'album.
Une touche de rock vient délicatement déposer une délicieuse empreinte électrique sur Morning en compagnie d'un hôte pas comme les autres : le génial Robert Wyatt pour former un duo mémorable sur cette pièce dantesque et poétique de près de 8 minutes. Exceptionnel. L'envoûtement, le charme diffusé par River est si beau et puissant qu'une fois de plus, je ne peux que m'incliner devant un tel savoir-faire. Fabuleux. You Say insère une touche de chaleur et de douceur bienvenues sur ce morceau qui fait la part belle à la guitare et batterie. La deuxième partie de l'album s'avère plus expérimentale, tout d'abord avec la présence de deux "interludes" de luxe de moins de 2 minutes : le minimaliste et vibrant Scenery et le planant Scenery Postludium. Blue Room Yellow Tree nous plonge dans un univers onirique et doucement pyschédélique, une merveille qui accueille dans les choeurs la présence de Robert Wyatt. Lament intervient comme une belle petite bulle d'oxygène mélancolique avant de se voir offrir la chance d'écouter une relecture de River par Robert Wyatt, dont le fantôme bienveillant est omniprésent sur l'opus, le résultat gagne encore en densité sur ce morceau qui dégage une réelle magie. La conversation spatio terrestrielle Spacetalk cède le pas à Spacewalk qui clôture l'album sur une note d'une indicible grâce et raffinement. Nous sommes définitivement hors apesenteur.
La découverte du meilleur album de jazz suédois 2009/2010 s'impose comme une oeuvre d'une grande sophistication mais qui cependant requiert de nombreuses lectures avant de faire le tour de toutes ses facettes d'une grande richesse et volupté. Un sommet du jazz, ni plus, ni moins.
Note Finale : 18/20
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2 commentaires:
Bravo pour votre blug: beau travail
Mille merci de me faire decouvrir cette Jeanette qui nous prouve que le jazz peut sortir de son ghetto et embrasser tres largement toutes les musiques . Ce CD est genial.
Vive la suede!
Vive les vieux (robert Wyatt a mon age : 65 ans)
Meme choc qu'avec Rock Bottom il y a ...34 ans !
Amicalement.
b.g
Et bien je crois que le Jazz opéra spatial est mon nouveau style de musique préféré!!! Non mais quel talent :-o ; une voix et une originalité qui feraient palir bien des divas formatées de Blue Note... Je l'ajoute définitivement à ma longue liste d'albums à acheter. Merci!
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